Sans trop de raisons objectives, il s'était pris de passion pour cette jeune femme, secrétaire de son patron, sur laquelle il avait posé son dévolu. Un déjeuner, accepté du bout des lèvres avait fini par le conforter dans son égarement, tout au long d'un repas où il avait pas mal ramé.
Ce qui ne l'avait pas refroidi.
Cette fille un peu hautaine et distante ne le savait pas encore elle-même, mais elle était "évidemment" faite pour lui. Et son attitude, que n'importe qui de normal aurait au mieux qualifié d'indifférence, n'était à ses yeux qu'une sorte de protection pour ne pas souffrir sentimentalement.
Juste question de temps, de patience et de persuasion pour qu'elle s'en rende compte à son tour. C'était pas gagné.
Mais pas perdu non plus...
Après plusieurs demandes insistantes, elle avait fini par accepter du bout des lèvres - et sous réserve qu'il se conduise "en tout bien tout honneur" - un week-end tous les deux (il n'osait pas dire "en amoureux") dans l'appart que ses parents à lui possédaient sur la côte normande.
Un deux pièces coquet tout neuf dans une résidence élégante à deux pas de la plage, un grand lit, mais aussi un clic-clac dans le salon, ce qui avait achevé de rassurer la dame.
Il voulait être gentleman, lui servir de garde-fou, lui montrer qu'il n'était pas comme les autres, ceux qui - il le subodorait - lui avaient fait du mal.
Salauds de bonshommes ! Avec lui, ce serait différent. Forcément...
Pas con, il lui laisserait le temps qu'elle s'apprivoise comme ce foutu renard du Petit Prince.
Il ne pouvait pas blairer ce roman imposé de force à des générations de mouflets depuis la disparition quasi mystique de l'aviateur sanctifié, mais c'était une bonne référence. Les célèbres dessins du boa qui avale un éléphant en forme de chapeau et ce mouton bêlant, il les avait vu toute son enfance.
À force de lecture maternelle avant d'aller dormir, il avait pris en grippe ce bouquin au point de détester les côtes d'agneau et tout ce qui de près ou de loin s'apparentait à la gent ovine...
Mais sachant qu'un peu de romantisme cucul la praline faisait toujours son petit effet sur les frangines, il s'en servait à tour de phrases, la truffe humide et l'œil en cocker. Efficace, pas cher. Bon investissement culturel avant de culbuter la demoiselle en travers du clic-clac.
Ou du lit à deux places si l'affaire se conjugalisait rapidement et que plutôt que d'aller voir l'Aiguille creuse, ils passent la journée au lit. (à suivre)
Image © Christophe Carlier
11 commentaires:
Stan,je me délecte! Enfin une âme soeur qui n'aime pas non plus Le Petit Prince.... Trop de loufoqueries incompréhensibles... Mais quelques belles formules restent encore dans l'esprit ("L'essentiel est invisible pour les yeux").
Passons...
Cela dit, votre cynisme est tout nouveau et rafraîchissant!
P.S: pourrais-je savoir comment ou pourquoi vous êtes passé de Stan à E?
Mais si vous faites attention, vous verrez que je signe Stan/E. en fait.
Stan est le pseudo recensé, celui qui est le plus connu et le plus usité (sur DD par exemple), E. l'initiale (Eugène, Eusèbe, Emile, Etienne, Etc...) d'un prénom qui pourrait bien être le mien. Ou pas.
Les deux s'accordent, ensemble ou séparément. C'est Doctor Stan et Mister E. à votre convenance.
Enfin c'est ce que vous voulez, l'important n'est pas là...
Je déteste le Petit Prince. Et j'utilise là un ton pour une histoire que vous imaginez bien peu à mon avantage. Quand je suis ridicule autant la jouer autrement... Non ?
La suite ;) surtout si elle est peu à ton avantage :D
Fausse idée
J'aurais jamais pu imaginer que le "petit prince" soit cité dans ton blog.
Une jeune femme qui te résiste Stan ?! je sens que cette histoire va me passionner , en plus si elle est hautaine et pimbêche ... ça va même m'inspirer tient !
@ Andy: ce n'est qu'une "nouvelle" qui me vient comme ça. Vrai aussi que ce bouquin ne me plaît pas plus que ça...
@ Aqua: Une histoire inventée ou vécue...? Qui sait ?
Histoire réelle ou non...qu'importe, j'ai l'impression que même les histoires imaginées sont aussi un mélange d'émotions vécues venant d'anciennes histoires et de celles rêvées, souhaitées...
Le reste c'est planter un décor, un appartement, un clic clac, un livre...et laisser les choses monter. J'aime bien cette histoire, cette certitude que l'homme a pour deux.
Le petit prince quant à moi ne m'a jamais été imposé. J'ai aimé ce livre. C'est rare, très rare quand je n'aime pas un livre. J'y prends toujours quelque chose.
"Il ne pouvait pas blairer ce roman ", "romantisme cucul la praline", "Je déteste le Petit Prince"
... Une explication ?...
En tout cas, servir "à tour de phrases" quelque chose que l'on exécre, c'est laisser croire qu'on est sur la même longueur d'ondes alors qu'on ne l'est pas, non ?...
Je ne crois pas que ça ait le moindre intérêt que j'explique plus avant pourquoi j'aime ou je n'aime pas certains trucs, films, livres and so on. Je parle ici de mes goûts, de mes envies et franchement peu importe qu'on ne les partage pas de l'autre côté, je ne veux les imposer à personne.
Donc le fait que je déteste ce livre n'a aucune prétention particulière si ce n'est de le dire, et n'a pas besoin d'explication de texte pour "prouver " quoi que ce soit à qui que ce soit.
Mais ma VRAIE question était celle du 2nd paragraphe...
En me relisant, je reconnais que j'avais mal formulé les choses. Mais en fait, hormis le fait que je m'étais dit que vous étiez un peu brutal dans votre façon d'assassiner le bouquin de St. Ex, c'était la 2ème partie de mon com qui reflètait mon questionnement.
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