16 octobre 2006

Film culte... et kitsch.

Voici près de vingt ans, “Neuf semaines et demie“ d'Adrian Lyne (1986) fut considéré comme un véritable film culte par amateurs de fessées et de BDSM de tout poil.

C’est du passé: aujourd'hui, ce long métrage date vraiment.

Une “relecture“ récente vous le montrera sans doute sous un jour un peu "boursouflé", voire franchement daté eighties sur le plan de l’esthétisme et de l’image...

Une sorte de clip bourré de tous les effets vus et archi-vus durant cette période... Ah, les contrejours, les rideaux d'eau avec la lumière crue derrière et autres artifices rebattus...

Reste le trouble qu’il a pu générer, indépendamment de ses qualités (ou donc de ses défauts) artistiques. Et cela personne ne pourra le nier...

Nombre de mes complices filles ont depuis sa sortie régulièrement placé ce film au rayon émotionnel de leur cinémathèque personnelle, parfois comme un révélateur, ou ont carrément souhaité vivre une histoire à la manière d’Elizabeth, l'héroïne de cette histoire...

Mais très peu ont lu le livre.

Dommage, c’est infiniment plus âpre et violent.

Le personnage incarné par la bimbo Basinger, sa grosse bouche, sa moue, sa blondeur et son regard perdu croise le beau Mickey, (beau à l'époque... depuis il s'est pas mal dégradé) ses oreilles, sa queue (!) et sa tête de petite gouape...

Lui ne sort pas de chez Disney, mais émerge d’un groupe d’acteurs en devenir, révélés entre autre par Coppola, le fameux "Brat Pack"

Emilio Estevez, Anthony Michael Hall, Rob Lowe, Judd Nelson, Kevin Bacon, Matthew Broderick, Tom Cruise, John Cusack, Matt Dillon, James Spader, Kiefer Sutherland, Patrick Swayze et autres, excusez du peu. Pas les plus mauvais ni les plus moches non plus...

Mais c’est Rourke qui empoche la donne et se retrouve dans le film au parfum vénéneux refusé par pas mal d'autres à Hollywood, effrayés par le sujet. Et malgré un succès plus que mitigé aux USA, le film triomphe en Europe, plus particulièrement en France: Rourke y conquiert un public féminin, son sourire, sa façon d’être ont envoûté les demoiselles latines plus que les américaines insensibles. Toutes aiment à s’imaginer entre ses griffes, dans son loft new yorkais de golden boy…

Le film est tiré de "Nine and a half weeks - A memoir of a love affair", livre d’une jeune femme dont le pseudo est Elizabeth McNeill… On sait qu’elle y racontait sa propre histoire, sa passion, sa déchéance et son jusqu’au-boutisme érotique dans ce récit SM excessivement choquant pour l’Amérique puritaine et reaganienne des années 80…

Elle travaillait pour une grande société à Manhattan quand elle a commencé une relation trouble par un homme rencontré dans une galerie d’Art. Leur excitation sexuelle a vite tourné à une confrontation, parsemée de jeux de domination et d’humiliation qui vont crescendo. Au fur et à mesure, ils glissent à deux vers des variations toujours plus dangereuses et raffinées de sadomasochisme.

Vers la fin, Elizabeth a abandonné tout contrôle de son corps et de son esprit… Seule échappatoire pour se sauvegarder, rompre. Arrêter cette liaison, fuir pour échapper à l’emprise de cet homme, mais aussi et surtout à sa peur panique d’y trouver trop de plaisir extrême, d'être submergée par la violence de son désir, de ses propres sens, sans réussir à se dominer elle-même.

"Avec un détachement qui rend l’expérience et les sensations qu'elle décrit plus effrayantes dans leur intensité, l’auteur vraie executive woman et miroir de son personnage dévoile SON histoire réelle à peine romancée et vous invite dans le monde hypnotisant et dangereux de “neuf semaines et demie“… Précisons qu’Elizabeth McNeill est un pseudonyme. Elle vivait à New York au moment de la publication en France de son audacieux roman en 1984... "(Le livre est sorti aux USA en 78, je crois...)

Incroyablement hot, le roman de McNeill va bien plus loin que l’imagerie "clipesque" qu’en a donné Adrian Lyne, le metteur en scène qui l'adapta pour le cinéma et en fit une sorte de "Flashdance" érotique.

À sa décharge, c'est devant les hauts cris de ses producteurs et pour échapper à la censure américaine (catastrophique pour l'exploitation en salle) qu'il a dû pas mal élaguer dans son travail, évitant ainsi le X-rated. Du coup, à l’arrivée, le film en salle est gentiment soft par rapport à ce qu’il avait tourné et malheureusement le plus intéressant est tombé sous les ciseaux des Parques… D'après la jaquette du DVD ci-contre, il y aurait même une version américaine "uncut et uncensored"...

Kim Basinger a dit à l'époque avoir gardé la plupart des chutes de ses scènes les plus torrides avec son Mickey...

Soit plus de dix heures de vidéos censurées, sauf pour elle et ses proches... Il se murmure qu'Alec Baldwin n'aurait guère apprécié, mais leur mariage datant de quelques années après le film, il a finalement gardé son avis pour lui...

Parlant de l'ensemble de ces scènes tournées, qui sont selon les dires de tous les acteurs et de Lyne: "plus qu'intimes et très crues...", (mais censurées, donc) Kim Basinger affirme que c’est "là qu’est à son avis LE véritable film", qualifiant même (histoire de bien nous mettre l'eau à la bouche) la version officielle sortie en salle de "bluette pour ados"... Nous, on veut bien la croire.

... Mais on ne le verra jamais, alors...

Elle précisait aussi à mots à peine couverts dans l'interview que ce tournage très "difficile" lui avait révélé pas mal de choses sur son "moi intime" et que Rourke (très proche durant la réalisation) et elle s’étaient très impliqués, à tout point de vue.

Visiblement Kim, qui a reçu plusieurs fessées au passage, n'est pas ressortie tout de suite, ni indemne de cette histoire-là…

PS: Please, même pour les non-anglophones, ne surtout pas voir ce film en version française: préférez-lui à tout prix la VO américaine.

En VF, outre un doublage indigne (comme souvent) et désastreux rendant ridicule les dialogues, la voix de fausset de Rourke et surtout celle de "pétasse décolorée" haut perchée choisie pour Elizabeth/Basinger (qui a une voix rauque et
un peu sourde en vrai) tuent un peu plus le film, à peine digne dans ces piteuses conditions audio des nullités que nous inflige M6 le dimanche soir...



9 commentaires:

Jill a dit…

J'avoue que j'avais adoré ce film. Mais il a beaucoup vieilli (j'ai d'ailleurs un post à ce sujet sur mon blog). Je confirme vos propos et dernièrement la découverte de "La secrétaire" m'a semblé s'approcher plus de cette dépendance entre dominant/dominé (qui n'est pas vraiment celui que l'on croit ;o)). Un film à la fois sombre et lumineux. Bien joué en plus ! Il vieillira également forcément !

Stan/E. a dit…

Je viens du coup de relire mon texte. Je n'en changerais pas une virgule. J'ai beaucoup aimé aussi à l'époque, surtout en sachant que l'histoire est vraie, à peine romancée par Elizabeth McNeill qui l'a vécue au début des eighties.

"La secrétaire" dont j'ai causé aussi, vaut à mon sens davantage par la qualité de l'interprète, Maggie Gyllenhall, formidable, que par Spader, aussi sensuellement attrayant qu'une endive mal cuite.

Mais je ne suis pas objectif...

SO a dit…

ça fait bien longtemps que je ne l'ai pas revu. Alors, ce film date-t-il autant que vous semblez le dire ?...
Moi qui ai tant de mal à prendre du recul et qui ai tendance à "vivre" le film, 9 semaines 1/2 m'a envoutée...l'atmosphère, le sourire narquois de Mickey Rourke...troublant, si troublant !
En plus, lorsque j'ai connu mon mari, il n'habitait pas NY, mais Paris dans un grand appart au dernier étage d'un immeuble avec terrasse au-dessus. Imaginez un peu les court-circuits dans mon esprit !!! Il est vite devenu impératif que nous regardions ce film ensemble... Ah cet appartement du bd Suchet !
Bravo, vous m'avez donné envie de lire le livre, je viens de l'ajouter à ma commande Amazon !

Stan/E. a dit…

Le livre est excellent. Bien mieux que le film, qui par ailleurs fut aussi un des mes long-métrages "cultes"... Jadis.

So a dit…

En effet, le film est édulcoré par rapport au livre. Davantage de possibilité d'identification pour moi avec le film. J'y retrouve cependant cette même atmosphère très particulière qui me fait chavirer (encore gagné), même si le livre s'éloigne de mon univers érotique. Va falloir que je lise le bouquin en anglais, parce que "mon chat", "mon chou", "ferme ta gueule", en français, là, ça passe pas du tout pour moi !
Bon, le livre date autant que le film. Les chaussures Charles Jourdan...maintenant, il lui aurait offert des Louboutin j'imagine...
Quelque part, j'ai lui que vous cuisiniez très bien...lui aussi cuisine...surtout des omelettes. Et vous ?
Qu'y a-t-il dans votre garde robe ? Ok, vous l'avez déjà un peu décrite ailleurs. Il est comment votre lit ? Rire !

Stan/E. a dit…

Roman démodé, sans nul doute et datant typiquement des années 80; à lire en anglais pour les mêmes raisons qu'il faut voir le film en VO pour les voix originales des acteurs. De Kim, principalement, à qui la voix française ne rend pas les graves.

Erik A. a dit…

Nine and a Half Weeks: A Memoir of a Love Affair by Elizabeth McNeill, Francine Prose


The powerfully erotic memoir that inspired the legendary film with a forward by bestselling novelist Francine Prose. Nine and a Half Weeks is a true story so unusual, so passionate, and so extreme in its psychology and sexuality that it will take your breath away.

Elizabeth McNeill was an executive for a large corporation when she began an affair with a man she met casually. Their sexual excitement depended on a pattern of domination and humiliation, and as their relationship progressed they played out ever more dangerous and elaborate variations on that pattern of sadomasochism.

By the end, Elizabeth had relinquished all control over her body -- and her mind.

With a cool detachment that makes the experiences and sensations she describes all the more frightening in their intensity, Elizabeth McNeill deftly unfolds her story and invites you into the mesmerizing and dangerous world of Nine and a Half Weeks-- a world you won't soon forget.(less)

So a dit…

I've ordered the book in english 2 days ago. Waiting for it...

So a dit…

It leads us to the edge of the abyss...Where the boundaries of self are obliterated and all things become permissible.

Pourquoi est-ce que "Mon choux, vas-tu la fermer", et "Ferme ta gueule" me heurtent, alors que "Sweetheart, will you please shut up." et "I want you tu shut the fuck up", j'arrive à les accepter? C'est pourtant du pareil au même.
Question de langue ou d'attrait pour une certaine forme d'éducation ?...
Anyway, the book is much better in english, indeed !